Le toucher relationnel

 

La peau, notre plus grand organe sensoriel ! Celui par lequel nous nous relions en permanence avec notre environnement matériel et humain. Il nous permet d’avoir toutes les informations nécessaires pour nous ajuster et nous adapter au monde qui nous entoure.

Bon, aujourd’hui, nous sommes un peu en difficulté…faut pas se toucher…covid19 oblige…

Mais j’espère que nous allons très vite surmonter cela ! Patience, nous pourrons bientôt je l’espère, pouvoir de nouveau nous donner la main…

Parce que, je vous le rappelle, le CRDL ne fonctionne pas avec des gants ! Nous sommes dans un toucher « peau à peau », dans une relation très proche, tant psychiquement, émotionnellement, que physiquement.

Mais quand même, j’aimerais vous faire part de quelques éléments qui me semblent importants. J’espère que vous serez suffisamment curieux pour avoir envie d’aller voir d’un peu plus près ce qui est en jeu dans le toucher, et que vous aurez envie de partager vos réflexions avec nous.

 

En 1994, Didier Anzieu expliquait dans ses travaux sur le « Moi-Peau » l’importance de l’impact des ressentis sur le développement psychique de l’humain. La peau (environ 70 récepteurs nerveux au cm carré) est à la fois lieu d’expérimentation extéroceptive, de relation primordiale, de contenant et d’étayage du Moi psychique, de barrière à l’intrusion et à l’agression, mais aussi lieu du désir libidinal (recherche de plaisir pour soi).

D’autres Maîtres avant lui avaient déjà mis en lumière l’importance de la relation entre le corps physique et la construction du Moi psychique, au travers de concepts tels que la « fonction contenante » pour W.R Bion et M. Klein, Le « holding », le « handling » et « l’espace transitionnel » chers à D.W. Winnicott, « la peau psychique » de E. Bick.

Les travaux de Julien De Ajuriaguerra, développant l’idée première d’Henri Wallon, ont ainsi décrite l’étroite relation entre le dialogue tonique dans la relation de la mère à l’enfant et le bain émotionnel qui enveloppe l’enfant dans cette relation. Le bébé n’est pas seulement nourri du lait de sa mère, il est aussi nourri de toute son attention affectueuse, de ses gestes de tendresse, de son regard aimant, de sa douceur, de l’odeur de son sein, de son tonus musculaire pendant qu’elle le porte, de ses mots d’amour… Véritable dialogue émotivo-tonique, cette première expérience sensori-motrice va permettre à l’enfant de se construire identitairement (individu singulier dans une relation sociale).

L’ensemble des récepteurs sensoriels sont déjà en jeu (primaires par le portage et les soins corporels prodigués par la maman, et secondaires par la participation active de la vue, de l’odorat, l’ouïe, le gustatif et le tactile-grassping du bébé), permettant à l’enfant des perceptions positives, agréables, bonnes pour lui et ouvrir ainsi le champ des émotions et des affects (joie, amour, attachement, mais aussi peur de la rupture, colère quand celle-ci survient…).

Ce qui est en jeu, pendant l’accompagnement avec le CRDL, comme dans l’accompagnement snoezelen, ressemble fort à un retour antérieur à qui je pense être aujourd’hui (vieux, malade, seul, isolé…), où une reconstruction psychique devient possible. Je ne suis pas seulement un corps défaillant, une mémoire qui s’étiole, je suis un être humain avec son histoire, ses ressentis, ses émotions, ses joies, ses peurs aussi…

Et si une personne m’accompagne dans un moment relationnel agréable, je peux retrouver qui je suis vraiment, profondément, au-delà des limites que la vie aujourd’hui m’impose.

Depuis les années 2016, les scientifiques se penchent attentivement sur cette notion de « toucher émotionnel ». Je vous invite à aller lire l’article de « Cerveau et Psycho » de février 2016, n° 74, pour y retrouver des informations qui me semblent importantes. Vous y retrouverez un article concernant les fibres CT, fibres qui permettent de ressentir un toucher « affectueux », un toucher émotionnel, qui ne passe pas dans le néocortex, mais vont directement toucher notre centre des émotions (cerveau limbique).

 

La personne renoue avec ses ressentis et émotions sans passer par l’analyse intelligente de ce qu’elle vit. Avec le CRDL, l’émergence d’images mnésiques positives (mémoire sensorielle, émotionnelle) va permettre de retrouver des souvenirs enfouis (mémoire autobiographique et mémoire procédurale), ou simplement permettre d’être présent à soi-même et à son environnement. Plongée dans un bain sensoriel agréable, positif, enveloppant, la personne va pouvoir « oublier » le temps de son accompagnement sa réalité de « patient, de personne âgée, démente, malade, de personne porteuse de déficiences… » et redevenir une personne entière, sensible à tout ce qu’elle est, à tout ce qui l’entoure.

Et surtout, parce qu’elle va être actrice de la séance, parce qu’elle va pouvoir toucher directement son interlocuteur, et jouer une nouvelle partition de vie sur la peau nue de l’autre, elle va pouvoir de nouveau donner sens à sa vie ! Or, être un acteur de la relation à autrui, c’est vivre ! c’est exister !

Voilà mes amis, ce que je voulais partager avec vous.

Désolée du retard de publication, mais parfois, les joies des connexions internet m’obligent à m’adapter…

Je vous souhaite une très belle fin de semaine, un beau week-end, et vous retrouve lundi prochain. J’espère que vous aurez pris plaisir à ma prose, et attends vos retours, vos réactions, vos réflexions, et peut-être des idées de discussions…

 

Bye bye,

 

Marie

Marie-Christine

Educatrice spécialisée, je suis diplômée en psychothérapie en Allemagne (Université de Lörrach) depuis 2003. J'ai exercé pendant un an dans une structure de réinsertion professionnelle pour personnes en rupture sociale (longue maladie, chômage longue durée, personnes Asperger) avant de revenir en France où je me suis installée. J'ai obtenu une reconnaissance de niveau d’étude par le Rectorat de Strasbourg, qui m'a permis d’obtenir en 2009 mon CAFERUIS (certificat d’aptitude aux fonctions de chef de service du secteur médico-social). Je suis titulaire d’un DIU en soins palliatifs et accompagnement en fin de vie de l’Université de Médecine de Strasbourg (2016). Je suis l’auteur d’un petit livre racontant le quotidien des personnes que j'ai accompagnées : « Entre vents et sommets ». Formée aux aspects bio sensoriels par le professeur Stéphane Maris depuis 2014, et à l’éthologie appliquée à l’humain par Laurent Knodt, j'applique en accompagnement snoezelen ces deux aspects fondamentaux à la compréhension de la personne accompagnée. J' interviens en qualité de formatrice auprès des professionnels du secteur médico-social, tant en France qu’en Italie, et participe ainsi à l’amélioration de la qualité de vie des personnes les plus fragiles (structures pour personnes TSA, polyhandicapées, EHPAD, services de soins palliatifs), mais aussi en écoles spécialisées dans l’intégration en scolarité normale des enfants « différents » (SESSAD et ITEP en France, crèches adaptées en Italie). j' interviens régulièrement dans les IFSI en Alsace, en qualité de formatrice pour les futures Aides-soignantes et infirmières à l’accompagnement des personnes handicapées. Depuis juin 2019, je me suis formée à l’utilisation du CRDL, un outil de communication innovant qui allie l’audition et le toucher pour créer du lien et redonner aux personnes vulnérables un accès à l’émotionnalité et à leur sentiment d’existence. Je suis déficiente visuelle, accompagnée de Hermione, mon caniche royal chien guide, « le chien le plus snoez au monde. Je suis aussi aussi la présidente fondatrice de de l’association "Monde Snoezelen "

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